Famille Humeurs

C’était un samedi…

Il y a 2920 jours, c’était un samedi. Un de ce jour chaud et ensoleillé dès les premières lueurs de l’aube.

Je me souviens que la veille, j’avais arpenté les villes de la Côte d’Azur pour trouver une Tropézienne de chez Picard avec une amie. Chaque stop and go et nids de poule sur le route me faisaient espérer que tu arriverais. Nada. Pas de signe.

Puis le 12 juillet 2008, à l’heure où la presse papier remplissait les étalages de libraires et ne parlaient que de l’anniversaire des Bleus (10 ans de 1,et 2, et 3 - 0 !), j’ai senti comme une sensation étrange, comme un filet d’eau pour m’annoncer le déluge imminent.

Il était 5h du matin. Il faisait déjà tellement chaud et je me cramponnais aux draps par intermittence. Contractions à intervalles régulières. Fissures de la poche des eaux. Tu me faisais signe.

Je me suis alors levée pour aller prendre mon café sur la terrasse face à la majestuosité de cette montagne toulonnaise. Regarder les lumières envahir les sentiers, les rochers…Donner une nouvelle couleur à ce monument naturel.

Malgré chaque contraction, le moment était empreint de sérénité et de douceur. Debout sur le carrelage blanc et froid de ma terrasse, je prenais toute la mesure de ma chance et de ce tsunami qui m’attendait. La rencontre se profilait. Je n’avais pas peur. Mal certes, mais pas peur. Je me sentais bien. J’étais exactement là où je voulais être. Les pieds ancrés dans ce moment hors du temps, en profitant de ce silence réconfortant et de ces mouvements incontrôlés dans mon corps.

Vers 8h je me souviens que je suis allée réveiller ton père. Il a sauté du lit, prêt à bondir dans la voiture, valise sous le bras et femme accroché à l’autre. Je l’ai rassuré, calmé. Ce n’était pas encore l’heure. Nous avions le temps de nous préparer. Au sens propre comme au figuré.

Un bain et du spasfon plus tard, les contractions se rapprochaient. Intensément. Douloureusement. Heureusement.

Tu le sais maintenant que je n’en fais qu’à ma tête. Ce jour là n’a pas dérogé à la règle. Je voulais un thermos pour que ton papa ait du café pendant la longue attente à la clinique. Je l’ai donc expressément orienté vers Décathlon. Le slogan ne m’a jamais autant fait sourire que ce jour là : « A fond la forme ! ».

J’ai arpenté les rayons en m’accrochant ici et là, entre les tongs et les maillots de bain. Je tenais ton papa comme une moule à son rocher. Pour ne pas tomber. Pour maîtriser ces vagues incessantes de vie qui déferlaient en moi.

A la caisse, de dos, une vendeuse me demande de laisser passer une personne en fauteuil. J’ai répondu un petit « non » en grimaçant. Elle s’est excusée. Elle n’avait pas vu mon ventre. De dos, je ne paraissais pas enceinte. Dernier compliment de cette aventure de 9 mois. En souriant, en pleurant, j’ai dis « merci » et nous sommes partis.

Je sentais pourtant au fond de moi que ce n’était pas encore l’heure. Par je ne sais quelles ressources nerveuses et physiques, j’ai rassuré ton papa et je lui ai demandé de rentrer un peu à la maison.

Dans notre home sweet home, toujours face à ma montagne, j’ai appelé ton oncle, tes grands parents. « Oui oui, ça sera aujourd’hui, je vais bientôt partir ! Non non, j’ai encore le temps je vous assure ! « . J’ai vérifié une nouvelle fois ma valise, mon iPod et j’ai eu faim. Midi sonnait.

Si il y a un endroit le samedi qui est noir de monde, c’est bien le centre commercial Mayol de Toulon. Havre climatisé au pied du port, il est apparut comme l’escale idéale pour rasséréner ma faim. Une envie de big mac comme pour atténuer cette envie de crier au monde que j’allais devenir maman. C’est bien connu, la nourriture calme le corps et apaise le coeur. Temporairement en tout cas.

Une fois repue, j’ai voulu acheter la presse. Je voulais voir cette date du 12 juillet 2008 inscrite quelque part. La lire, la relire et prendre pleinement conscience de sa nouvelle importance. J’ai choisi de prendre de la lecture sérieuse, Closer a fait l’affaire ! ;)

14h, ton père trépignait. Il était temps que j’accède à sa requête et que j’apaise son stress. Direction la maternité.

La suite, elle s’est enchaînée naturellement. Admission, prise de sang, vérification du col, monitoring confirmant mes contractions toutes les 4 minutes. Le verdict de la sage femme est tombée : « votre bébé arrivera bien aujourd’hui ! » Le poids de ces mots m’ont fait chavirer. J’allais te voir, te sentir et tu allais faire de moi une « maman ».

Vers 16h, je suis enfin partie en salle d’accouchement. Ton père était concentré sur la prise régulière de mon homéopathie. La sage femme me dit que j’allais avoir la péridurale.

Poche des eaux percées, péri posée, un repos salvateur s’est offert à moi le temps d’un heure. Mon corps en avait besoin. Mon âme a continué de se préparer

De la fenêtre, je me souviens que je voyais le soleil d’un bleu unique comme la Côte d’Azur peut l’offrir. Il y avait deux oiseaux sur le toit voisin, qui pépiaient et sautillaient. Je les ai regardé, comme hypnotisée par cette vie au dehors. Je ne voyais que la vie en moi qui prenait son élan. Le choc de la conscience d’être ici et maintenant. Maman en devenir.

18h30, tes cheveux confirmaient ton envie de sortir de là. Ton papa s’est posté à ma tête, fort et fier, même si ému à en trembler. J’ai alors suivi mon instinct et j’ai poussé. J’ai donné toutes mes forces à mon corps pour t’aider. J’avais pourtant en moi ce sentiment ambivalent : vouloir te voir mais vouloir te garder. Sauf que la nature fait ce qu’elle veut de nous. Elle fait fi de nos émotions pour s’imposer dans la réalité.

A 19h07, tu as pris ta première bouffée d’air. Tu as poussé ton premier cri. Rose, ronde, tu étais chaude et tellement belle. Tes yeux s’ouvraient déjà à la vie autour de toi. Mes premiers mots ont été : « Bienvenue mon amour ! Je t’aime déjà tellement ! ».

J’ai alors laissé mon flot de larmes couler. De bonheur, de délivrance, de soulagement, de joie et de chance.

Théa signifie « don de Dieu ». A l’heure où on me parlait de stérilité, de syndrome d’ovaires polykistiques, tu as fais un pied de nez à la science pour te nicher en moi. Tu étais ce cadeau de Dieu que je n’espérais plus, cette ode à la vie qui balaye les certitudes des savants.

C’était un samedi. Il y a 2920 jours.

J’ai calculé, cela fait plus de 70 000 heures que tu as fait de moi une « maman », une autre femme. Tu m’a fais grandir, tu m’as émue, tu m’agaces aussi parfois (bonjour pré-adolescence !).

Mais pas une journée ne passe sans que je ne remercie le ciel et la vie de t’avoir offerte à moi. Tu remplies ma vie d’une palette de couleurs infinies. Tu en fais des confettis, des étincelles et des prismes. Tes yeux sont aussi profonds et doux que ce jour de ta naissance. Ton sourire est solaire. Ta présence aussi.

De tout mon cœur, de toute mon âme, je célèbre ce 12 juillet comme une providence depuis ce samedi particulier.

N’oublies jamais mon cœur, que la vie est un cadeau mais que tu es mon cadeau.

Reste aussi spontanée et positive.

Continue d’aimer les autres comme ils sont, sans jugement ni condition.

Aime la vie comme elle t’aime, comme je t’aime.

Profite de chaque jour comme je le fais depuis 12 juillet 2008.

Bon anniversaire ma Zébrelle.

 

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